Dans mes oreilles, Kindness rimait avec déception. Son single ultra-dansant Cyan était prometteur, mais je me suis vite ennuyé avec son premier album World, You Need A Change Of World.
À l’écoute de World Restart, premier extrait de son nouvel album, je n’arrivais pas à saisir mon ressenti. Une musique plus élégante et moins fouillie, laissant semble t-il place à plus de respiration. L’apparition de choeurs et d’une voix féminine prenant le relais au milieu du morceau, viennent à surprendre. C’est à travers cette juxtaposition de voix, que j’ai commencé à apprécier réellement le chanteur.
Sur Otherness, Adam Bainbridge (à l’origine du projet Kindness), a fait comme son pote Blood Orange il y’a un an : il a convié plusieurs invités. De Robyn, pour la plus populaire à des voix beaucoup plus intimes (Kelela, Tawiah), chacun vient se blottir contre les notes jazzy.
Sa voix, qui pourrait agacer par ses élans surélevés, se révèle sensuelle et bouleversante. M.anifest le rejoint sur l’un des meilleurs titres de l’album. Précédé pendant deux minutes par la voix de Kindness, le rappeur US injecte son flow qui coule parfaitement sur les rivières mélodiques.
Côtoyant probablement beaucoup Blood Orange, Kindness réalise un album dansant. Il ne suffit pas de mettre un pied devant l’autre et d’engager son partenaire dans une pirouette, ici c’est le corps et l’esprit qui dansent ensemble. Il nous le prouve dans le clip de This is not about us.
L’air mélancolique sur la pochette, on imagine que Kindness ne nage pas en plein bonheur. La liste des titres confirme le propos, où l’on devine une histoire encore chaude et douloureuse.
S’interrogeant sans cesse (Who do you love?, Why Don’t You Love Me?), sans vouloir se résigner, Kindness déroule les étapes cuivrées d’une post-rupture. Les traces restent sur le corps, les images dans la tête. Il faut vivre avec, tant pis.
Au premier abord surannée, l’esthétique de Kindness dévoile ses atouts au fil des écoutes. La musique devient presque solennelle. Les multiples voix et instruments ne font qu’un. Ainsi naquit Otherness.